Il se peut que dans votre vie de conseiller immobilier, vous soyez obligé d’estimer un bien de l’horreur, c’est-à-dire dans lequel il y a eu un décès – c’est ce qui m’est arrivé et ce qui est arrivé à des membres de ma Team. La situation est parfois gênante, particulièrement lorsque le décès n’est pas de mort naturelle… Quelle est alors la bonne approche pour vendre une maison du crime ? Une mort violente ou un suicide peut-il avoir un impact sur la valeur du bien ? Faut-il en parler aux acquéreurs ? etc. sont autant de questions légitimes, que vous vous poserez. Halloween est le moment que j’ai choisi pour aborder de façon décalée ce sujet très sérieux.

Qu’est-ce qu’un bien de l’horreur ? Les exemples les plus connus

Un bien de l’horreur est un bien dans lequel il y a eu décès par mort violente ou suicide.
Vous avez tous entendu parler de maisons tristement célèbres où des crimes horribles se sont passés.

C’est le cas de la maison louée par Xavier Dupont de Ligonnès vendue en 2012.
Le prix affiché était de 450 000 euros. Elle aurait été vendue, d’après le Figaro, à peine 200 000 euros au bout de 4 ans…

C’est aussi l’histoire du chalet de la famille Flactif évalué plus de 800 000 €, vendu aux enchères 315 000 euros. Ce chalet est aujourd’hui loué en location saisonnière.

Ou encore la maison de Landru. Annoncée comme « une maison chargée d’histoire » par une des agences en charge de la commercialiser, au prix de 450 000 euros.

Bien sûr, vous n’aurez pas tous à vendre la maison de Xavier Dupont ou de Landru. Mais vous aurez, tous, dans votre vie de conseiller immobilier ou d’agent, à vendre ou estimer un bien dans lequel il y a eu un décès, un suicide, voir une mort violente.

Un décès, un suicide ou une mort violente a-t-il un impact sur la valeur d’un bien ? Les avis divergent

Il est clair que pour certains cela ne change rien, un bien est un bien.

J’ai vu dans les forums des réactions diverses à ce sujet.
Sujet d’ailleurs très sensible et relatif aux personnes.
Il est vrai que certaines maisons sont tellement vieilles qu’un simple décès dans les lieux s’est forcément produit.
D’ailleurs, les arguments assortis sont : si l’on devait en tenir compte, plus rien ne se vendrait.

Et nombreux d’entre vous s’accordent à dire que le décès d’un des grands-parents, dans sa maison de façon naturelle est normal et fait partie de la vie.

C’est certain, mais si le décès est récent ?
Ou si la mort n’est pas naturelle ?
Est-ce que cela change quelque chose ?

Vendre un bien après un décès : ce que disent les sondages

En 2018, un sondage d’Opinion Way, réalisé à l’occasion d’Halloween, précisait que 46 % des Français croyaient aux fantômes et aux esprits.
Et que 70% des personnes interrogées étaient superstitieuses.

Une autre étude réalisée par Harris interactive révèlait que 16 % des 16-24 ans faisaient des recherches spécifiques sur un logement avant d’y habiter – comme vérifier s’il y a eu un décès dans des circonstances particulières ou si le bâtiment a été construit sur un ancien cimetière…

Vendre un bien à la suite d’un suicide ou d’une mort violente : ce que disent les études

Si l’on retourne voir du côté de nos amis outre-Atlantique.
On constate qu’au Québec et au Texas par exemple, les vendeurs et les professionnels de l’immobilier ont pour obligation de déclarer un décès.

Tout particulièrement s’il s’agit d’un suicide ou d’une morte violente.

Au Québec, depuis 2012, on doit déclarer tout décès depuis l’origine du bien. Quant au Texas on se contente des 3 dernières années.
Et les verdicts tombent.

Une des dernières décisions des juges, notamment du Juge Robert Dufresnes, a donné raison aux acquéreurs.
Il a annulé la vente et condamné le vendeur à 38 000 dollars de dommages et remboursements.
Le couple avait acquis une maison et pendant les travaux de rénovation, un voisin les a informés qu’il y avait eu une double pendaison dans la maison.
Les acheteurs ont quitté les lieux sur-le-champ et ont porté l’affaire devant les tribunaux, le vendeur ne les ayant pas informés.
Un agent immobilier Americain, Roy Condrey, a même lancé un site Internet DiedInHouse.com afin de connaître l’histoire du bien que vous souhaitez acquérir.

Il avoue que lui-même ne serait pas prêt à vivre dans un endroit où il y aurait eu un suicide ou un meurtre.
Ce site compte environ 1 million de visiteurs annuels !

Cela peut sembler excessif, pour certains.
Et je vous entends déjà me dire, mais les Américains sont fous et ils adorent les procès.
Et bien pour en avoir parlé avec ma Team et vu la réaction des Français sur certains forums, la problématique n’est pas moins réelle chez nous…

Vendre un bien après un drame : les éléments à prendre en compte en dehors du ressenti

Comprenons bien, lorsqu’on achète son chez-soi, c’est aussi pour mettre à l’abri sa famille. Un endroit où l’on se sent bien, un refuge.

De plus, vous le savez, pour déterminer la valeur d’un bien on tient compte de plusieurs éléments :

  • des qualités intrinsèques du bâtiment (son état, les matériaux, son étage) ;
  • de son environnement plus ou moins proche (le voisinage, la situation géographique, la vue) ;
  • des charges et des taxes ;
  • des améliorations ;
  • de l’entretien courant ;
  • de l’intérêt porté par les acquéreurs sur ce type de bien ;
  • du positionnement du bien sur son marché dépend aussi de la demande, comme de sa rareté.

Vous m’entendez souvent parler de « biens cœur de cible ».

Le fait que le bien corresponde à la demande ou pas influe d’une part sur son prix, mais aussi sur le délai de vente.

Plus le nombre de personnes susceptibles de s’intéresser à ce bien se réduit plus le prix baisse. C’est le cas, par exemple, des biens vides restés un certain temps sur le marché, ou avec travaux, ça vous le vivez tous les jours…

Or, convenons-en, il est bien difficile de faire passer un décès non naturel de façon positive à un acquéreur ! La solution serait de ne pas en parler, mais bien évidement, des questions d’éthiques viennent se poser…

Et de toute façon, cela se sait, les voisins en parleront.
Une chose est certaine cela viendra aux oreilles de l’acheteur d’une manière ou d’une autre.

Dans ma petite ville, il y a eu une femme s’est donné la mort dans son garage par pendaison.
Son mari a suivi le même chemin quelques temps plus tard, sur la même poutre, par chagrin et culpabilité.
Je ne sais pas si cette maison a été vendue, mais tout le monde était au courant de ce drame.

Sachant cela, même si vous ne croyez pas aux esprits ou autre : pouvez affirmer avec certitude de ne jamais avoir une pensée ou une image de ces pendus dans le garage ?
Tous les jours quand vous garez votre véhicule (ou la nuit si vous avez oublié votre chargeur dans la boite à gant de la voiture, vraiment ?
Est-ce une pensée confortable ?

C’est un peu comme une maison cambriolée 4 fois, a-t-on envie d’y vivre ?
S’y sentirait-on en sécurité ?

Admettons que cela ne vous fasse rien, après tout c’est une question de ressenti, une sorte de barrière mentale matérialisée par : je suis capable ou pas de vivre dans une telle maison.

Qu’en sera-t-il le jour ou vous-même aurez à revendre le bien ?

Revendre un « bien à réputation » : est-ce plus facile ou pas avec le temps ?

La réputation de la maison aura-t-elle baissé ou est-ce que les effets se cumulent si vous vendez au bout de trois ans parce que vous divorcez ?
Pur hasard certes ou maison maudite ? Quel sera le ressenti des nouveaux acheteurs ? Bonne ou mauvaise énergie dans cette maison ?

Acheter une maison est pour y vivre des événements heureux.
L’idée qu’il y ait pu s’y produire de tels événements ne gâcherait-elle pas ce paradis, ce sanctuaire ?

Nous avons vu que les avis pouvaient diverger sur le sujet.
Mais ce n’est pas une simple question d’avis, il y a aussi des questions de droit auxquelles il faut répondre…

Comment vendre une maison du crime ou un bien théâtre d’un drame ? Les questions de droits

Un décès non signifié peut-il être considéré comme un vice-caché ?

Si l’acquéreur n’avait pas connaissance du drame au moment de l’achat : pourrait-il considérer cet élément comme un vice caché ?
Ou bien s’il l’avait su, aurait-il renoncé à l’acquisition ? Aurait-il investi le même budget dans ce bien ?

Le vice cache est un élément qui empêche l’utilisation du bien, mais on va dire pour simplifier plutôt de façon structurelle.

Certes l’existence d’un décès, ce n’est pas un vice caché.

En effet, cela n’affecte pas la qualité du bâtiment en tout cas pas de façon structurelle.

En revanche, l’acheteur doit pouvoir prendre sa décision d’achat en ayant tous les éléments lui permettant de décider.

Et ça de façon consentie et éclairée.

Et s’agissant du DOL ?

Du coup vient un autre principe de droit : le DOL
Rappelez-vous le dol repose justement sur le consentement éclairé de la personne – dans cas de l’acheteur.

Il y a trois catégories DOL :

  1. par manœuvre ;
  2. par le mensonge ;
  3. par le silence (omission volontaire).

Le DOL a pour objectif de vicier le consentement des personnes, c’est-à-dire si la personne avait eu connaissance de tous les éléments sa décision aurait été différente.

Dans notre situation on parle d’un « aspect psychologique » : soit la capacité/l’envie d’une personne de vivre dans un bien ayant connu un drame.

D’après ma hotline juridique, ce serait une situation dolosive (un stratagème), bien qu’il n’y ait pas encore de jurisprudence à ce sujet, en France.

D’ailleurs, au Québec, depuis la mise en place de cette information « obligatoire », les décisions des tribunaux semblent confirmer ce positionnement et donnent raison aux acquéreurs, ce que nous avons vu plus haut.

Je vous rappelle par ailleurs que le devoir d’information fait partie intégrante de votre métier.
Que votre devoir de conseil et d’information ne s’arrête pas à celui qui vous a mandaté.
Mais s’étend à toutes les personnes parties prenantes de la vente.
C’est-à-dire le vendeur et l’acquéreur.

Quels facteurs prendre en compte pour estimer un bien de l’horreur ?

Pour déterminer l’impact réel sur le prix il faudra tenir compte de plusieurs éléments. J’ai pu constater qu’un bien peut facilement perdre de 10 % jusqu’à 70% de sa valeur en fonction de :

  1. son histoire ;
  2. l’intensité ou l’ancienneté du décès ;
  3. les potentiels événements successif ;
  4. la réputation du bien (et de la médiatisation qu’il en a été faite) ;

Résultat ? Les délais de vente sont clairement rallongés. Certains biens ne trouveront jamais preneurs et finiront rasés ou abandonnés.

Une seule fois on a vu le bien prendre de la valeur parce que le propriétaire assassiné était une célébrité.

Ces biens sont considérés comme des biens avec défaut. C’est le panel de clients capables d’acheter de tels biens qui va en déterminer le prix.

Qu’on le veuille ou non cela ne fait strictement rien à certains d’investir dans des biens de l’horreur…
Mais d’autres n’achèteront jamais ce type de bien – ou n’y consentiront que si le prix est moindre.

Comment vendre un bien – a priori – invendable ? LA bonne approche…

La bonne approche est de dévoiler au minimum les morts violentes et les suicides aux acquéreurs, sans attendre le compromis.

Si vous ne le faites pas, bien qu’il n’y ait pas de jurisprudence en France à ce jour, l’acquéreur pourrait vous le reprocher et vous en vouloir amèrement – pensez à votre réputation.

Et il se peut qu’il puisse en plus faire jouer cette situation dolosive en sa faveur…
Si le DOL est reconnu, ayez conscience que cela entraînerait la nullité de la vente.
Gardez en tête qu’un acquéreur lorsqu’il achète doit le faire de façon éclairée et consentie.
Or, ce genre d’information pourrait complètement remettre en question son intention d’achat.

 

⏩ Envie d’aller plus loin ? Voici comment réussir sa visite immobilière

 

 

Zoom sur la fête d’Halloween

Halloween est une fête très apprécié des pays anglophones, vous le savez. Mais ce que vous ne savez probablement pas c’est qu’elle date de plus de 2 000 ans et qu’elle est d’origine Celte.

Le 31 octobre, c’est la date à laquelle le calendrier celtique se terminait.

Cette dernière nuit de l’année était celle du dieu de la mort, le Dieu Samain.
Et durant Samain, la légende raconte que les morts en profitaient pour rendre visite aux vivants.

La coutume était alors de se vêtir en habits terrifiants pour faire peur aux fantômes.

Ou tout du moins pour qu’ils laissent les vivants tranquilles, leur laissant penser qu’ils étaient des leurs.
Et d’autres proposaient des offrandes pour les apaiser.

Cette coutume arrive aux USA et au Canada suite à la migration en masse des Celtes, au milieu du 19e siècle, à cause d’une famine sans précédent.

Je vous le fais bref, mais en gros c’est avec le catholicisme que cette fête est devenue Halloween.
Halloween est la contraction de « All Hallows’Eve » soir de tous les saints.

Et pour le coup la veillée du 1er novembre, le jour de célébration des Saints.